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Intelligence Artificielle : protéger les enfants, une mission commune

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Pendant trois jours, une soixantaine d’experts se réunissent au Vatican pour discuter des «Risques et opportunités de l’intelligence artificielle pour les enfants». Cet événement est organisé par l’Académie pontificale des Sciences, l’institut d’anthropologie de l’Université pontificale Grégorienne et la World Childhood Foundation. La conférence, ainsi que ses objectifs, a été présentée en Salle de presse du Saint-Siège ce jeudi 20 mars.

Le Pape François et la Curie romaine ont abordé à plusieurs reprises les enjeux de l’intelligence artificielle : l’Appel de Rome, le message pour la Journée mondiale de la paix, son intervention au G7, ou encore les directives mises en place par le Vatican et le document publié en janvier par plusieurs dicastères. Jusqu’ici, cependant, cette réflexion n’avait jamais été spécifiquement centrée sur la protection et le bien-être des enfants.

«Comme Église, notre mission est de prendre soin des blessés et des plus vulnérables, et ainsi des enfants. À ce titre, nous devons leur garantir des relations et un environnement sûrs. Pour eux, le monde numérique est un espace majeur de communication. Or aujourd’hui, il existe des risques dans cet espace», explique le père Hans Zollner, directeur de l’institut d’anthropologie de l’Université pontificale Grégorienne. Avec l’Académie pontificale des Sciences et la World Childhood Foundation, créée il y a 25 ans par la reine Silvia de Suède, il coorganise cette rencontre de trois jours à la Casina Pio IV. La reine elle-même était présente à l’ouverture des travaux ce jeudi après-midi, accompagnée du Secrétaire d’État du Saint-Siège.

60 experts issus de divers horizons

Venus des États-Unis, d’Inde, du Nigeria, de Bruxelles ou encore du Royaume-Uni, des universitaires spécialisés en sciences humaines ou exactes dialogueront jusqu’à samedi avec des experts de l’intelligence artificielle, des entrepreneurs, des investisseurs, des élus européens, ainsi que des membres d’organisations internationales ou d’ONG, engagés dans l’éducation ou la protection des enfants. Leur objectif est d’analyser «les risques et les opportunités de l’IA pour les enfants», thème central de cette conférence.

Si l’intelligence artificielle peut indéniablement aider les enfants à développer certaines compétences, par exemple en facilitant l’apprentissage des langues, la lecture ou en soutenant les enfants porteurs de handicap, elle comporte aussi des dangers réels. Parmi ces risques figurent l’addiction, le harcèlement, la surveillance excessive, ou encore l’exposition des enfants à un marketing agressif et à des prédateurs sexuels.

«Sans condamner personne», précise le père Zollner, cette rencontre cherche à encourager un dialogue entre les différents acteurs concernés.

Une responsabilité partagée

La Secrétaire générale adjointe de la World Childhood Foundation, Bretta Holmberg, insiste sur le risque d’un désengagement des décideurs et institutions, qui «s’éloignent de ce sujet parce qu’elles ont l’impression de ne pas en savoir assez sur la technologie pour pouvoir agir». Cela revient, selon elle, à laisser aux entreprises technologiques le soin de gérer seules la question. «C’est une grave erreur, souligne-t-elle, alors nous laissons la place à ceux qui ne comprennent pas les enfants, qui ne voient pas de première main comment l’IA peut être mal utilisée aux dépens des enfants, ni comment l’IA peut être utilisée pour les protéger».

Elle rapporte qu’en Suède, lors d’une rencontre organisée par sa fondation, des professionnels travaillant avec des enfants ont souligné des problèmes liés à l’IA. Les experts technologiques présents, qui ignoraient l’existence de ces difficultés, ont cependant rapidement trouvé des solutions techniques pour y remédier. «La technologie fait partie du problème, elle doit faire partie des solutions», conclut Britta Holmberg.

«Il faut mettre de l’éthique dans les datas, avant de les mettre à disposition des consommateurs», affirme de son côté le chancelier de l’Académie pontificale des Sciences. Le cardinal Peter Turkson rappelle également que le dialogue déjà entamé entre le Saint-Siège et certains leaders de la Silicon Valley, via le groupe Minerva, a permis des avancées. «Ceux qui créent des modèles peuvent aussi influencer leurs collègues», observe-t-il. En 2023, le comité de direction de Minerva comptait des figures influentes telles que Reid Hoffman, cofondateur de LinkedIn, James Manyika, vice-président technologie et société chez Google, et Jean-Hugues Monier, dirigeant de McKinsey.

Un chantier encore à ses débuts

À la question des différences d’approche entre l’Union européenne, qui cherche à réguler l’IA, et l’administration américaine, plus réticente, les intervenants ont mis en garde contre certains stéréotypes.

L’Union européenne régule certes, mais «cela fait maintenant deux ans qu’un projet de loi concernant les enfants est à l’étude. Il reste beaucoup à faire», souligne le professeur Joachim von Braun, président de l’Académie des Sciences.

Concernant les États-Unis, leur implication est également significative. Le père Zollner mentionne le travail de la Necmec, organisme américain présent à la conférence. Cette agence à but non lucratif, fondée il y a quarante ans par le Congrès, se consacre à la protection des enfants disparus ou exploités. «Elle a recensé 29 millions de cas d’abus d’enfants en ligne», précise-t-il. En coopération avec Interpol, elle signale des cas d’abus en Europe, contribuant ainsi à l’arrestation de suspects.

L’usage de contenus pédocriminels générés par l’IA est en plein essor, entraînant une multiplication des enquêtes et des poursuites judiciaires. Europol a annoncé il y a trois semaines avoir mené l’opération Cumberland, impliquant 19 pays, qui a conduit à 25 arrestations. Grâce à la coopération des autorités australiennes, françaises, allemandes et britanniques, les suspects répartis dans plusieurs pays ont pu être identifiés et interpellés.


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