
#cotedivoire / Hommage
Quand le Père Hippolyte témoigne du Père Joël, de regrettée mémoire
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Rappelé à Dieu, le Père Bokpé Allou Joël a été inhumé récemment. Prêtre du Diocèse de Yopougon, Administrateur de la quasi paroisse Ste Famille d’Audoin, il laisse à la postérité de bons souvenirs. Et ceux du Père Hyppolite Yomaffou, scj, n’ont pu tenir dans un silence. Témoignage.
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Joël, toi que certains appelaient, non sans ironie, « Monsieur oh jeune, je suis prêtre »… Le jour de tes obsèques, les textes liturgiques étaient ceux du jour : ils parlaient du péché de la chair. Et notre Père Évêque, dans son homélie, a demandé pardon à Dieu pour toutes nos convoitises, pour nos péchés en pensée… Sa parole a terminé son chemin vers les prostituées.
Alors j’ai compris. J’ai compris pourquoi le ciel avait voulu que ce soient ces textes-là qui soient proclamés ce jour-là. Et je me permets aujourd’hui de trahir un peu le silence du secret pour rendre témoignage. Je voudrais donc à travers ces lignes diluer un peu ma douleur dans la lumière de la vérité.
C’est à Katiola que nos chemins se sont croisés. Nous étions alors en mission : toi à Fronan puis à la cathédrale, moi au Collège catholique de Katiola. À cette époque, nous avons vu arriver un groupe de jeunes filles anglophones, venues du Nigeria. Elles s’étaient installées dans la rue qui mène à l’hôpital général, derrière l’hôtel Hambol. La nuit, elles vendaient leur corps, sans doute pour survivre, parfois même pour échapper à un enfermement plus grand.
Un jour, tu m’as dit :
« Hippy, je vais m’arranger pour les attirer à l’Église et voir comment les évangéliser. »
Et tu l’as fait. Magistralement. Tu les as attirées à l’Église. Tu leur as ouvert les bras. Tu as su gagner leur confiance, leur redonner une dignité. Certaines sont même retournées au Nigeria. Nous avons découvert qu’elles étaient, en réalité, des otages — manipulées, abusées, entraînées ici avec la promesse d’un passage vers Londres ou les États-Unis. Tu en as consolé plus d’une, parfois jusqu’aux larmes. Tu as pris contact avec certaines familles. Tu as rendu à ces filles leur nom, leur histoire, leur avenir.
Oui, Joël… Si Monseigneur Salomon a pleuré pour ta générosité et ta charité, moi aussi j’ai pleuré. Tu étais un homme bon. Un homme vrai. Et je suis certain que ces filles de la nuit te pleurent également, comme pleure une Marie-Madeleine au tombeau du matin.
Avec toi, le doigt du Christ a encore écrit dans le sable. Tu as plaidé la cause des prostituées. Tu as regardé autrement, là où le monde méprisait. Tu as aimé, là où nous étions tentés de juger.
J’ose espérer que le diocèse de Yopougon saura faire mémoire de ton œuvre. Que ton nom soit porté par un projet humain, une maison d’accueil, un foyer, une œuvre vivante pour les pauvres et les marginalisés.
Car tu as aimé les plus petits. Et le Christ, lui, ne l’oublie pas.
▪️Père Hippolyte YOMAFOU, scj
Quand le Père Hippolyte témoigne du Père Joël, de regrettée mémoire
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Rappelé à Dieu, le Père Bokpé Allou Joël a été inhumé récemment. Prêtre du Diocèse de Yopougon, Administrateur de la quasi paroisse Ste Famille d’Audoin, il laisse à la postérité de bons souvenirs. Et ceux du Père Hyppolite Yomaffou, scj, n’ont pu tenir dans un silence. Témoignage.
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Joël, toi que certains appelaient, non sans ironie, « Monsieur oh jeune, je suis prêtre »… Le jour de tes obsèques, les textes liturgiques étaient ceux du jour : ils parlaient du péché de la chair. Et notre Père Évêque, dans son homélie, a demandé pardon à Dieu pour toutes nos convoitises, pour nos péchés en pensée… Sa parole a terminé son chemin vers les prostituées.
Alors j’ai compris. J’ai compris pourquoi le ciel avait voulu que ce soient ces textes-là qui soient proclamés ce jour-là. Et je me permets aujourd’hui de trahir un peu le silence du secret pour rendre témoignage. Je voudrais donc à travers ces lignes diluer un peu ma douleur dans la lumière de la vérité.
C’est à Katiola que nos chemins se sont croisés. Nous étions alors en mission : toi à Fronan puis à la cathédrale, moi au Collège catholique de Katiola. À cette époque, nous avons vu arriver un groupe de jeunes filles anglophones, venues du Nigeria. Elles s’étaient installées dans la rue qui mène à l’hôpital général, derrière l’hôtel Hambol. La nuit, elles vendaient leur corps, sans doute pour survivre, parfois même pour échapper à un enfermement plus grand.
Un jour, tu m’as dit :
« Hippy, je vais m’arranger pour les attirer à l’Église et voir comment les évangéliser. »
Et tu l’as fait. Magistralement. Tu les as attirées à l’Église. Tu leur as ouvert les bras. Tu as su gagner leur confiance, leur redonner une dignité. Certaines sont même retournées au Nigeria. Nous avons découvert qu’elles étaient, en réalité, des otages — manipulées, abusées, entraînées ici avec la promesse d’un passage vers Londres ou les États-Unis. Tu en as consolé plus d’une, parfois jusqu’aux larmes. Tu as pris contact avec certaines familles. Tu as rendu à ces filles leur nom, leur histoire, leur avenir.
Oui, Joël… Si Monseigneur Salomon a pleuré pour ta générosité et ta charité, moi aussi j’ai pleuré. Tu étais un homme bon. Un homme vrai. Et je suis certain que ces filles de la nuit te pleurent également, comme pleure une Marie-Madeleine au tombeau du matin.
Avec toi, le doigt du Christ a encore écrit dans le sable. Tu as plaidé la cause des prostituées. Tu as regardé autrement, là où le monde méprisait. Tu as aimé, là où nous étions tentés de juger.
J’ose espérer que le diocèse de Yopougon saura faire mémoire de ton œuvre. Que ton nom soit porté par un projet humain, une maison d’accueil, un foyer, une œuvre vivante pour les pauvres et les marginalisés.
Car tu as aimé les plus petits. Et le Christ, lui, ne l’oublie pas.
▪️Père Hippolyte YOMAFOU, scj
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